D’or et d’oreillers (Flore Vesco)

D’or et d’oreillers (Flore Vesco)

Résumé de l’éditeur

C’est un lit vertigineux, sur lequel on a empilé une dizaine de matelas. Il trône au centre de la chambre qui accueille les prétendantes de Lord Handerson. Le riche héritier a conçu un test pour choisir au mieux sa future épouse. Chaque candidate est invitée à passer une nuit à Blenkinsop Castle, seule, dans ce lit d’une hauteur invraisemblable. Pour l’heure, les prétendantes, toutes filles de bonne famille, ont été renvoyées chez elles au petit matin, sans aucune explication. Mais voici que Lord Handerson propose à Sadima de passer l’épreuve. Robuste et vaillante, simple femme de chambre, Sadima n’a pourtant rien d’une princesse au petit pois ! Et c’est tant mieux, car nous ne sommes pas dans un conte de fées mais dans une histoire d’amour et de sorcellerie où l’on apprend ce que les jeunes filles font en secret, la nuit, dans leur lit…

Mon avis

Cette adaptation du conte « La princesse au petit pois » nous plonge dans la noblesse anglaise au XIXe siècle. Monsieur Handerson est un lord jeune, beau et riche qui cherche une épouse avec une méthode peu orthodoxe, et pour cause, il n’organise pas de bal ou de jeux d’esprit lors de pique-niques. Les prétendantes doivent en effet passer une nuit dans son château et cette nuit déterminera si elles feront des épouses adéquates. Apparemment, elles doivent passer une épreuve sur laquelle plane un certain mystère…

Poussées par leur mère, les 3 sœurs de la famille Watkins se rendent au château de lord Handerson afin que l’une d’elles puisse éventuellement conquérir le lord tant convoité : il y a Margaret, l’aînée, Marta, celle du milieu, et May, la petite dernière.

« Ces trois jeunes filles de la bonne société anglaise étaient de fort délicates créatures. Mrs Watkins pouvait être fière d’avoir produit ces jouvencelles aux fins cheveux blonds, à la mince ossature point trop tapissée de chair. Elle avait veillé sur leur taille étroite, leur avait appris à ne laisser échapper qu’un petit filet de voix. Il en allait des filles comme des bagages : moins elles prenaient de place, et plus elles seraient faciles à caser. »

C’est l’aînée qui va passer le test en premier et découvrir qu’il s’agit de passer une nuit dans une chambre mystérieuse au sein du château dans un lit où sont entassés de nombreux matelas (comme celui de la Princesse au petit pois). Malheureusement, elle et ses 2 sœurs échouent au test, c’est alors que Sadima (17 ans), la jeune femme de chambre au service des sœurs Watkins, décide d’explorer le château, de percer le mystère du lieu, et réussit la 1ère épreuve. Durant son séjour, des phénomènes surnaturels se produisent à moins que ce ne soit son imagination qui ne lui joue des tours. Une histoire étrange de jeux amoureux commence, dans laquelle l’onirisme et la magie se mêlent au fantastique, l’absurde à l’humour et la sensualité aussi.

« – Vous verrez, poursuivit-il. Demain matin, à 9h57 précises, je vous embrasserai.

Il ramassa sa couverture et la salua. Avant de s’éloigner, il se retourna et ajouta :

 -Et je vous préviens, je vais mettre la langue. »

Flore Vesco nous livre ici un nouvel opus de qualité. Elle prend comme toujours soin des mots, du rythme et du vocabulaire ; elle crée un univers empli de réminiscences et des personnages ayant assez d’épaisseur pour retenir l’attention. Elle s’en donne à cœur joie pour renverser les rôles et brouiller les pistes, Salima se retrouvant dans ce rôle si souvent échu à la gent masculine, à prendre des risques et affronter des dangers pour sauver la personne qui fait battre son cœur.

Le démontage de conte n’ira pourtant pas plus loin : si l’héroïne prend fermement son destin en main, il n’y aura pas de manifestation d’une quelconque solidarité féminine, la course au mari se fait en solitaire, c’est chacune pour soi, et parfois les rivales sont machiavéliques ! Dans la 2e partie du récit, la demeure prend un rôle plus important, apportant à l’histoire une symbolique très intéressante et une touche fantastique palpitante. Vous l’aurez compris, je recommande ce conte qui vous fera passer un chouette moment de lecture !

Le +

  • La plume de Flore Vesco et sa façon de structurer la trame narrative de ses récits sont une valeur sûre.
  • La dimension symbolique de la mère toxique à travers la maison hantée est très bien amenée.
  • La libre interprétation de la masturbation féminine nocturne avec le fameux petit doigt déchaîne la chronique !

Le –

Il n’est pas facile de conseiller ce conte, tellement il est atypique et sort des sentiers battus. Deux pistes : il plaira aux lecteurs qui aiment les contes longs et ceux qui sont intéressés par une relation toxique entre une mère et son enfant.

Le coin des profs

Le récit ne présente pas de difficulté de lecture, hormis la symbolique évoquée, à côté de laquelle certains lecteurs peuvent tout à fait passer sans réel problème. Le livre ne doit toutefois pas être mis entre toutes les mains, sous peine d’être taxé de professeur irrévérencieux par les parents pudibonds (rappelez-vous du petit doigt dans le lit pendant la nuit).

Niveau de lecture

Intermédiaire

Genre

Conte

Mots clés

Angleterre, château, convention, destruction, épreuves, famille, maison hantée, magie, mariage, mystère, relation toxique, solitude

Vous aimerez ce récit si vous avez aimé…

Orgeuils et préjugés, Jane Austen

Infos pratiques

  • À partir de 15 ans
  • L’école des loisirs
  • 234p.
  • 15€
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