Guilty. L’affaire Diego Abrio (Jean-Christophe Tixier)

Guilty. L’affaire Diego Abrio (Jean-Christophe Tixier)

Résumé de l’éditeur

Diego Abrio, 22 ans, purge sa peine de prison pour homicide volontaire. Pourtant il va être relâché.

Sera-t-il libre ? Non !

Le peuple aura le droit de le tuer, ou de le protéger dans sa fuite. Toi aussi. Vas-tu suivre son parcours sur l’application Guilty ?

Participer à sa traque ? Ou…

Mon avis

L’application Guilty permet de faire libérer un prisonnier lorsqu’il atteint 3 millions de votes positifs. Mais il ne s’agit pas de retrouver la liberté ou d’offrir au détenu un nouveau procès : le relâché est en réalité livré et traqué par une population déterminée à se venger. Ceux qui le croiseront pourront faire ce qu’ils veulent de lui : l’aider, le tuer, le lyncher, le torturer. Et il n’y a pas de date limite à ce jeu.

Diego, 22 ans, est concerné par le programme. Il a été jugé et condamné après avoir provoqué un accident mortel sous l’emprise de l’alcool et de stupéfiants. Sans jamais nier la culpabilité de Diego, Jean-Christophe Tixier interroge dans « Guilty » la vision de la justice et repense la loi du Talion dans une version moderne.

« La loi m’oblige à vous communiquer les données suivantes. Sur les 237 personnes ayant déjà été relâchées dans le cadre de cette procédure, 175 sont mortes après avoir été lynchées par la population, 9 ont réussi à rassembler les preuves de leur innocence et ont bénéficié d’un acquittement. Les 53 autres ont disparu. »

Alors qu’on pense à filmer les procès dans un but historique, la tentation, avec la médiatisation de certaines affaires, de laisser la population décider du sort du présumé coupable est grande, c’est sur ce terreau que « Guilty » semble trouver son origine. J’ai été intriguée par ce résumé qui mêle justice et réseaux sociaux dans une traque haletante. Le roman suit une trame très dynamique où le lecteur suit un Diego victime d’un système machiavélique. En effet, justice et vengeance semblent se confondre pour une population qui ne réfléchit plus et ne juge qu’avec les sentiments. Le contexte, les enjeux, le principe de Guilty, l’histoire de Diego et de ses victimes sont habilement incorporés dans le récit et on est tenu en haleine par les multiples situations dans lesquelles Diego n’est jamais très loin de subir la vindicte populaire.

Le jeune homme, lui, ne cherche qu’à aller s’excuser pour la perte qu’il a provoquée chez sa victime, mais aussi à trouver une issue de secours. « Guilty » est un roman qui permet vraiment de réfléchir sur la manière de rendre la justice. Il offre un personnage principal touchant et intéressant, coupable et victime à la fois.

J’ai parfois été mal à l’aise avec cette application qui fait que télé-réalité et réalité se mélangent. Avoir le droit de vie ou de mort vis à vis de quelqu’un, même incarcéré, c’est très dérangeant. Je me suis vraiment dit tout au long du roman qu’on était dans une fiction, mais qu’elle n’était pas si loin de la réalité. J’ai aimé que l’auteur n’apporte pas de réponse toute faite à cette question de la médiatisation à outrance et de la vengeance populaire, mais qu’il suscite la réflexion à travers le point de vue des personnages secondaires. Par exemple, quand le peuple cherche à tuer un criminel, ne se comporte-t-il pas un peu comme lui ?

Jean-Christophe Tixier fait intervenir dans son récit une galerie de personnages, qu’il faut bien avouer un peu caricaturaux : une traqueuse chevronnée persuadée que la mort est la seule justice possible, une défenseuse des droits des prisonniers qui défend la prison, la mère de la victime rongée par le chagrin, ou encore le frère de la victime guidé par l’esprit de vengeance. Ces deux derniers pensent que la mort de Diego est la seule manière de faire leur deuil face à une sœur qui ne voit pas du tout les choses de la même manière.

Le déchaînement dans cette chasse à l’homme est bien décrit et l’ensemble permet d’avoir un point de vue intéressant sur la situation et de s’interroger : qu’aurions-nous choisi à leur place ? Si j’ai bien aimé le scénario de « Guilty » ainsi que le fond de l’histoire, j’aurais quand même apprécié une histoire un peu plus étoffée. Certaines situations ou certains personnages ne sont pas assez exploités pour qu’on comprenne leurs motivations (par exemple, la sœur de la victime). L’auteur crée vite un sentiment d’urgence, de traque, ce qui rend l’ensemble un peu prévisible, mais la fin est plus ouverte, on ne sait pas ce que Diego va devenir concrètement. Apparemment, un deuxième tome est prévu, c’est donc une affaire à suivre…

Le +

  • Le style est très fluide, ce qui rend la lecture très facile.
  • Le suspense est haletant et rend la lecture addictive.
  • Le questionnement sur les dérives des médias et de la vindicte populaire est intéressant.

Le –

  • Les personnages secondaires sont un peu caricaturaux.
  • La fin ouverte peut laisser un goût de trop peu.

Le coin des profs

Le roman ne présente aucune difficulté de lecture et offre une belle porte d’entrée pour aborder les thèmes cités plus haut.

Niveau de lecture

Débutant

Genre

Thriller

Mots clés

Crime, cruauté, folie, jeu, justice, libération, pardon, prison, réseaux sociaux, vengeance (populaire), vote

Vous aimerez ce récit si vous avez aimé…

The hunger games, Suzanne Collins

Infos pratiques

  • À partir de 15 ans
  • Rageot
  • 243p.
  • 14.90€
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