Moon brothers (Sarah Crossan)

Moon brothers (Sarah Crossan)

Résumé de l’éditeur

Joe Moon a dix-sept ans. Il vient de quitter New York pour aller vivre un temps au Texas. Son frère aîné, Ed, est en prison là-bas. Jugé coupable du meurtre d’un policier, il attend son exécution dans le couloir de la mort. Or, la date approche. Alors Joe veut être là, aider son frère à affronter ces dernières semaines. Car sinon, Ed sera tout seul. Mais voilà qu’un nouvel avocat reprend la défense du condamné… et il a l’air d’y croire. Joe osera-t-il espérer encore ?

Mon avis

Dans la famille des frères Moon, il ne reste plus grand-monde… Le père est parti depuis longtemps, la mère, une alcoolique instable, est aux abonnés absents, tante Karen a pris le relais mais en a assez et a fui aussi, Ed le grand frère est en prison pour le meurtre d’un policier, il ne reste plus qu’Angela qui bosse pour faire tenir debout ce semblant de famille et son petit frère Joe, 17 ans, le personnage central de ce roman.

La nouvelle vient de tomber : Ed est condamné à la peine capitale, il ne lui reste plus que quelques semaines à vivre. Alors, même si Joe ne l’a pas revu depuis ses 7 ans, âge auquel son frère a été emprisonné, il n’hésite pas une seconde : il part sans rien et cherche du travail pour louer un studio minable près de la prison où est son frère. Il sera seul à le tenir à bout de bras dans ses derniers jours d’existence, sans jamais se plaindre et en donnant tout l’amour qu’il peut, même s’il a du mal à reconnaître son grand frère qu’il n’a plus revu depuis toutes ces années et même si exprimer ses sentiments est difficile pour lui, histoire familiale chaotique oblige.

Joe est âgé de 17 ans quand il prend la décision de se rendre seul au Texas où il devra repartir de zéro. Dans ce trou perdu où il atterrit, la prison génère une véritable économie locale grâce aux familles qui viennent rendre des visites, c’est interpellant. Il trouve un petit appart miteux, un boulot foireux, fait de nouvelles rencontres… Il passera un été assez difficile, loin de chez lui et de sa famille brisée. On sent à travers l’histoire la lourdeur du fardeau qui pèse sur ses épaules, on sent sa solitude, on admire sa détermination à vouloir soutenir son frère, alors qu’il est terrifié, même s’il espère que le nouvel avocat d’Ed pourra faire gracier son frère (il pense qu’il est innocent, mais il n’est pas sûr et n’ose pas poser la question à Ed).

J’ai beaucoup aimé ce roman qui traite d’un sujet grave : la peine de mort et ses dérives. L’écriture est originale, car en vers libres, ce qui crée un certain suspense, le compte à rebours étant enclenché. Ce roman est très touchant et nous permet de découvrir non pas le point de vue de la famille des victimes, mais le point de vue des proches des personnes reconnues coupables. J’ai trouvé ce point de vue assez intéressant, surtout qu’il est traité tout en nuances. L’histoire se déroule aux États-Unis et dans l’état où Ed a tué un homme, la peine de mort est toujours appliquée (alors que dans d’autres non, quelle absurdité et quelle injustice !). Par ailleurs, la justice n’est pas rendue de la même manière selon la personnalité de la victime et du coupable. Eh oui, les plus pauvres, ceux qui ne maîtrisent pas les rouages du système judiciaire, ceux qui survivent plus qu’ils ne vivent dans ce pays, sont les personnes les plus lésées. C’est révoltant, mais tellement juste à la fois !

« Ils ont coffré Ed pour le meurtre d’un flic, un crime bien moche,

mais tous les criminels ne finissent pas sur la chaise électrique.

Y a des mecs qui écopent de quinze ans.

D’autres, de la perpétuité.

Ed, c’est la mort.

Mais c’est pas pour tout le monde pareil.

Ça dépend en fait

de qui

tu tues,

et d’où

t’étais

quand tu l’as tué.

Genre, par exemple,

tire pas sur un flic blanc à Walker Country, au Texas.

Si c’est ton truc, fais-le plutôt à Arlington, New York.

Là-bas, pas d’électrocution, pas d’injection.

Je trouve pas ça super juste, perso.

Je trouve que c’est un peu comme jouer

à la putain de loterie. »

Ce roman à la fois dur et tendre ne peut laisser personne indifférent. Il réveille en nous une volonté farouche de réclamer justice face à une enquête qui a été bâclée, jamais remise en cause, avec des proches qui se sont éloignés et qui reviennent parfois presque trop tard, avec ces personnes dont la vie quotidienne est rythmée par la prison. Ce livre interroge aussi sur la façon de survivre après la condamnation à mort d’un proche. Un coup de cœur pour ce roman coup de poing. À lire !

Le +

  • Le roman suscite une belle remise en question du système judiciaire américain et une critique des lois archaïques de la peine capitale. Un coup de pied lancé dans la fourmilière !
  • J’ai beaucoup aimé le personnage de Joe qui est très touchant dans sa détermination et ses fragilités. C’est un personnage nuancé très bien construit qui nous fait naviguer sans difficulté dans sa systémique familiale complexe et ses émotions ambivalentes. Un beau personnage avec du relief!

Le –

Joe est quelqu’un de très vulgaire. Ses insultes m’ont un peu fatiguée, même si elles collent tout à fait au personnage, qui sonne juste.

Le coin des profs

Le récit ne présente pas de difficulté de lecture à proprement parler et il ne faut pas être effrayé par les vers libres. Par contre, le contenu est très dur et le récit n’est, pour cette raison, pas à mettre entre toutes les mains.

Niveau de lecture

Intermédiaire

Genre

Drame

Mots clés

Culpabilité, deuil, douleur, famille brisée, (in)justice, pardon, mort, peine de mort, solitude

Vous aimerez ce récit si vous avez aimé…

La ligne verte, Stephen King

Infos pratiques

  • À partir de 15 ans
  • Rageot
  • 373p.
  • 15,90€
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